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A quand une langue commune pour l’'Europe ?
Témoignage d'un pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle

Il y a des évidences qu'’on ne voit pas. Des évidences qui sont invisibles lorsqu’'on est pris dans le train-train de la vie quotidienne, mais qui sautent aux yeux lorsqu'’on a la chance de prendre un peu de recul.

Cette chance, je l’'ai eue récemment. Après vingt ans d’'une vie professionnelle active et trépidante, j’'ai eu l’'opportunité de vendre mon entreprise et de partir de Bruxelles à pied avec mon sac à dos vers Saint Jacques de Compostelle. Un périple de plus de trois mois le long des sentiers belges, français et espagnols. J’'y ai rencontré des centaines de personnes et ai tissé des liens d’'amitiés avec la majorité d’'entre elles. Ces personnes venaient des quatre coins d’'Europe.

Au nom de tous les marcheurs rencontrés sur le chemin de Compostelle, je voudrais exprimer aujourd’hui notre profonde frustration de ne pas avoir mieux pu communiquer entre nous. Certains d’'entre nous pratiquaient plusieurs langues et pouvaient ainsi dépasser le stade de la conversation utilitaire avec un certain nombre de « collègues » venus d’'autres pays. Mais je n’'ai pas rencontré une personne maîtrisant les onze langues officielles de l’'Union Européenne, sans parler des nombreuses langues qui viendront s’'ajouter avec l'’adhésion prochaine des dix nouveaux pays. Bien sûr, la plupart des personnes possédaient quelques rudiments d’'Anglais mais cela ne suffisait pas pour échanger notre enthousiasme sur les merveilles architecturales, pour exposer le fonctionnement politique de notre pays, pour discuter de nos projets de vie ou encore pour débattre sur nos convictions, autant de sujets passionnants qui étayent une meilleure compréhension entre peuples différents.

Ne nous leurrons pas ! La connaissance de l’'Anglais est loin d’être une réalité, et ce dans la grande majorité des pays européens. Pourquoi ? Parce que l’'Anglais est une langue difficile à apprendre. L’'orthographe, la prononciation, la longue liste d’'exceptions, l’'usage des prépositions sont autant de raisons pour lesquelles peu de personnes sont à même d’'exprimer leurs idées dans la langue de Shakespeare.

Il nous est apparu comme une évidence que l'’Europe avait besoin d’'une langue véhiculaire unique. Non pas comme première langue, bien sûr. Notre langue maternelle et l’'héritage culturel y afférent sont les garants de notre diversité, première richesse de l’'Europe. Notre devoir est de préserver, d’'entretenir et de continuer à développer notre grande variété d’'idiomes. Mais par simple souci d’efficacité, il est fondamental que tous les pays européens puissent se comprendre sans l’'aide d’'une armée de traducteurs et d’'interprètes. L'’émergence prochaine de nouvelles grandes puissances économiques telles que la Chine ou l'’Inde forcera l’'Union Européenne à remplir son rôle de modérateur et d’'arbitre dans le respect de ses valeurs humanistes. A cette fin, nous devons mettre tout en oeœuvre pour accroître l’'efficacité des rapports intra-européens. La mise en place de l’'Euro comme monnaie unique fut un pas dans la bonne direction. L'’instauration d'’une langue commune en serait un autre. Nous n’'avons d’'ailleurs que trop attendu à cet égard.   Pourquoi le Parlement Européen ne voterait-il pas l’'apprentissage obligatoire de l’ « Eurolingua » dans toutes les écoles des pays de l’'Union ?

Mais quelle langue choisir ?

Nous l’'avons constaté plus haut, l’'Anglais est trop difficile à apprendre pour permettre à la plupart des Européens d’'exprimer leur opinion de façon correcte. L’Allemand et le Français ne valent guère mieux à cet égard. De plus, ces langues véhiculent un bagage historique, politique et culturel difficilement assimilable par d'’autres peuples.

La nouvelle langue européenne doit être neutre et facile à apprendre. Elle doit être neutre afin d’'éviter toute supériorité d’'un pays par rapport aux autres et tout préjugé culturel. Elle doit être facile à apprendre car personne ne souhaite consacrer beaucoup de temps à l'’apprentissage d’'une nouvelle langue.

A ce stade, nous avons deux possibilités. Nous pouvons soit créer une nouvelle langue de toutes pièces en tenant compte des diverses susceptibilités des pays membres. Ce travail risque toutefois de prendre beaucoup de temps et risque d’'être mis en péril lors de chaque nouvelle adhésion à l’'UE. Une autre possibilité est de prendre une langue neutre existante. L'’Esperanto nous semble être un candidat valable. Cette langue n'’est la langue officielle d’'aucun pays et est extrêmement simple à apprendre. Elle ne comprend que 16 règles grammaticales qui ne souffrent d'’aucune exception. Le vocabulaire provient principalement des langues européennes (d'’origines romanes, germaniques et slaves) et est particulièrement riche (250.000 mots facilement élaborés à partir de 20.000 mots-racines, par toute personne maîtrisant les quelques règles grammaticales). Il faut à peine trois mois pour véritablement maîtriser l’'Esperanto. Les supports d’'apprentissage (manuels, dictionnaires, méthodes audio/vidéo, cours,...) existent déjà et permettent donc une mise en place rapide. De plus, il existe des spécialistes de l'’Esperanto dans tous les pays européens.

Tout est là pour renforcer considérablement l’'efficacité de notre fonctionnement tant au niveau économique que politique, culturel, scientifique, social et financier. Il est de notre intérêt à tous d’'avoir une Europe forte. Qu’'attendons-nous ?

Marc De Wilde (parti de Bruxelles le 21/07/02 et arrivé à Saint-Jacques de Compostelle le 4/11/02)
marc.dewilde@mdwservices.com ou +32 (0)473 94.21.47

Rédigé le 22-Nov-2002

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